Introduction

Introduction

 
 

Il y a un peu plus d'un siècle, le biologiste E. Browicz [1] remarqua un phénomène propre aux globules rouges qu'il observait au microscope: l'intensité lumineuse que diffusent ces cellules varie de façon erratique d'un point à l'autre de la membrane, donnant lieu à une impression de scintillement. Avec l'avènement du microscope à contraste de phase inventé par le Hollandais F. Zernicke (pour lequel il reçut le prix Nobel en 1953), on s'aperçut que ces variations d'intensité sont dues à de petits mouvements rapides de la membrane des globules rouges. L'origine de ces mouvements est cependant restée mystérieuse jusqu'en 1975, date à laquelle deux physiciens français, Françoise Brochard et Jean-François Lennon [2], ont pu montrer qu'ils s'agissait d'un simple mouvement d'agitation thermique spontané de la membrane, ne nécessitant aucune activité biologique spécifique.

La forme très régulière et bien connue des globules rouges (les globules rouges d'une personne en bonne santé ont une forme biconcave et un diamètre de 8 micromètres) a également longtemps constitué un sujet d'étonnement. Cependant, lorsqu'on les plonge dans un milieu légèrement différent du sang (par exemple contenant certains types de médicaments), leur forme change dramatiquement: la forme habituelle de disque creusé en son centre (discocyte) est remplacée, suivant le milieu, par une forme echynocyte (en oursin), stomatocyte (en forme "d'estomac") ou tout simplement sphérique.

Les efforts de ces vingt dernières années ont permis aux physiciens de la "matière molle" (domaine d'étude dont la maturité a été récemment reconnue par l'attribution du prix Nobel à Pierre-Gilles de Gennes), de comprendre les propriétés d'objets que l'on peut qualifier de lointains cousins des globules rouges, les vésicules [3]. Ces vésicules, ou liposomes, sont des membranes fluides fermées, et font l'objet de recherches dont les motivations sont diverses. D'un point de vue fondamental, que nous illustrerons tout particulièrement dans la suite, il s'agit d'objets idéaux pour étudier la physique des surfaces fluctuantes, qui nécessite une approche combinant la physico-chimie et l'utilisation d'outils théoriques recoupant certaines problématiques modernes des mathématiques. A ce titre, les vésicules ont aussi une parenté avec les émulsions, les interfaces entre fluides, les cristaux liquides et ... la gravitation quantique !

Mais l'étude des liposomes se poursuit également dans les laboratoires de pharmacologie et de biologie cellulaire, pour leur utilité comme transporteurs de médicaments au sein du circuit sanguin. Nous n'évoquerons pas davantage cet aspect plus appliqué et très important, sinon en notant que certaines réponses aux questions de stabilité et de résistance des liposomes résultent des études fondamentales que nous allons décrire.
page réalisée par Xavier Michalet dernière révision: 16 septembre 1997

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